masse critique·roman

Tornade – A la poursuite du monstre des plaines américaines (2024)

Auteur : Simon Fichet

Editeur : Marchialy

Pages : 250

En librairie le 21 août 2024.

Simon Fichet accepte la proposition de son collègue, Alex, de partir filmer les tornades aux Etats-Unis, dans la réputée Tornado Alley, guidés par Laetitia, une chasseuse de tornades et Matthieu, spécialiste météorologique. D’abord enthousiaste, il déchante rapidement en découvrant dans quoi il s’est engagé, sans jamais oser révéler à son équipe les craintes et angoisses qui l’habitent.

Dans ce road trip au cœur de l’immensité américaine, Tornade se révèle un récit profondément humain et sincère dans lequel Simon Fichet nous raconte la course poursuite effrénée après les tempêtes et orages, les kilomètres engloutis dans des paysages désolés, à lutter contre la fatigue et les intempéries, à craindre pour sa vie quand la voiture roule à toute allure au cœur d’un orage d’une intensité redoutable ou chevauche un lac sur un pont en pleine crue soudaine ; l’accablement s’abat alors brutalement, le laissant avec un profond sentiment de solitude qui lui donne envie de rentrer chez lui, de quitter « ce pays où la démesure se donne en spectacle« .

Très imagée, l’écriture nourrit notre imagination par des descriptions précises et détaillées qui font parfois appel à des références que nous avons tou.te.s. Elle nous entraine à travers l’Amérique profonde et ses territoires immenses aux paysages monotones où la vie n’apparait qu’en pointillé dans les parc à bétails et des villes délabrées où « le rêve américain est, sinon une vaste blague, un lointain souvenir« , ses motels miteux et sa malbouffe.

Mais c’est la sincérité de l’écriture qui traduit le mieux le plaisir que j’ai pris à lire cette Poursuite du monstre des plaines américaines. Sincérité des émotions de Simon qui ne cherche jamais à vendre du rêve et décrit la dangerosité des situations qui le confronte à ses pires craintes, ses cauchemars, la difficulté du retour à son quotidien, à sa vie, et la nécessité de se reconstruire après cette aventure qui l’aura profondément marquée.


Là, au milieu des ténèbres texanes, je rencontre ma première éternité, cette dilatation du temps provoquée par le stress et la peur, qui semble ne jamais vouloir finir. Le visage crispé, le souffle court, je tente de survivre à ces trop longues secondes qui consument l’énergie d’une vie.

Le nuage avance vers nous à la vitesse d’un tsunami, gobe les moutons d’albâtre et fond vers le soleil bouche ouverte. En sursis, ce dernier inonde les alentours d’une lumière miraculeuse, pare la végétation de reflets d’or, épaissit les ombres. Le spectacle est de toute beauté.

Quelques mètres au-dessus de nous, le nuage immense tourne sur lui-même comme un carrousel sans fin, si bas que je pourrais presque en caresser le bois. Ça tourne, ça tourne, et je ne sais pas si je dois me réjouir.

Dehors, je contemple l’azur, les rues, le parking et, plus loin, les plaines du Colorado. Malgré l’annonce de Laetitia hier soir, j’ai du mal à croire que cette journée puisse nous conduire au pied d’une tornade : le ciel est trop bleu, la ville est trop calme, comment la mort pourrait-elle jaillir d’un tel panorama ?

Marietta. Suaire de nuages gris, foudres violettes, silence macabre. Personne, pas même une voiture. Boutiques, banques et administrations ont baissé le rideau. Dans la rue principale, le vent s’engouffre sans résistance, de petits tourbillons naissent au gré des rafales comme autant de mauvais génies ; décor idéal pour film de zombies.

Ca ? Mais de quoi parle-t-il ? Je regarde dans mon rétroviseur et vois une nuée blanchâtre nous foncer dessus. L’apocalypse commence. Des trombes d’eau s’abattent sur la voiture dans un fracas d’enfer, des rafales cognent de tous les côtés, la BM tangue comme jamais.

C’est fini. Le nuage est toujours là, les collines, les buissons, le bitume, les voitures, les autres chasseurs également, mais rien n’est plus pareil. Dans mon cœur, des émotions contraires se bousculent et s’annulent, laissant un vide colossal. J’ai la déconcertante sensation d’avoir assisté à un phénomène beau et répugnant, violent et interdit, la plus grande scène primitive de ma vie peut-être, un gigantesque coït entre le Ciel et la Terre.


Je remercie Babelio pour cette proposition de masse critique privilège et les éditions Marchialy pour l’envoi de ce titre qui m’a captivé d’un bout à l’autre.

Les journalistes ne choisissent pas toujours leurs sujets. C’est avec beaucoup d’appréhension que Simon Fichet accepte d’accompagner un collègue pour filmer deux chasseurs de tornades aux États-Unis, dans la dangereuse Tornado Alley. S’ensuivent douze jours de traque d’un phénomène monstrueux, aussi imprévisible que mortel, au milieu de paysages désertiques, de champs de pétrole et de fermes industrielles. La petite équipe devra parcourir près de 10 000 de kilomètres, traverser des tempêtes, rouler sous la grêle et la foudre, et surtout surmonter fatigue et angoisses pour, peut-être, approcher au plus près l’œil du cyclone.

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