masse critique·roman jeunesse

Les clans du ciel, tome 1. La quête d’Ellie (2023)

Skyborn, book 1. Sparrow Rising (2021)

Auteure : Jessica Khoury

Traductrice : Anath Riveline

Editeur : Bayard jeunesse

Pages : 384

Ellie avait six ans lorsqu’une attaque de gargouilles venues du ciel la priva de ses parents. Sauvée in extremis par une guerrière de la garde royale des Ailes d’Or, elle rêve depuis de rejoindre ce corps d’élite. Mais dans le Royaume des clans, chacun a une place dédiée et les beaux discours n’existent que pour apaiser les esprits : Les Moineaux sont des fermiers, leur travail consiste à cultiver et récoler les graines de tournesol pour produire l’huile nécessaire à lustrer les plumes de leurs ailes ; la garde royale est réservée aux clans d’élite tel que les Aigles, les Eperviers ou encore les Balbuzards…

Ellie est née Moineau et, dès les épreuves de sélection, elle se heurte à l’hostilité et aux mépris de sa communauté. Elle décide alors de prendre son envol pour aller au-devant de son rêve et prendre sa destinée en main. En chemin, elle fait la rencontre d’un trio d’enfants de son âge et se joint à eux pour atteindre la capitale, Thelantis. Guide de l’expédition, Nox, jeune Corbeau, interroge ses motivations et sa vision du monde. Sur le trajet, ils se confrontent à divers dangers et font une découverte surprenante qui pourrait redéfinir les limites du monde tel qu’ils le connaissent, et les amène à prendre des décisions qu’ils n’avaient pas imaginer.

Premier volume d’une série qui s’annonce déjà captivante, La quête d’Ellie est un récit fantastique jeunesse qui tire son originalité par son univers peuplé d’humains ailés auxquels l’auteure donne les caractéristiques communes des oiseaux auxquels ils s’identifient, agrémentées d’une bonne dose de préjugés : les moineaux collectent, les aigles sont royaux, les corbeaux volent… A cela s’ajoutent des traits plus personnels ainsi que, pour certains, des facultés particulières, sorte de magie qui trouve ses origines dans un héritage dont on ne nous dévoile rien pour le moment.

Si la construction narrative suit le même schéma que toutes les séries du genre, celle-ci gagne à être lu pour la richesse de l’univers que Jessica Khoury a su développer, en y insufflant une certaine authenticité. Aventure et péripéties sont eu cœur de l’intrigue dont les enjeux semblent reposer sur un pouvoir politique instable et inégalitaire. On en découvre bien peu sur les gargouilles de pierres qui descendent du ciel pour attaquer ce peuple mais l’auteure nous donne suffisamment d’information concernant leur source de pouvoir pour attiser notre curiosité d’un bout à l’autre du récit.

Le quatuor, formé par les jeunes héros, fonctionne parfaitement. J’avoue avoir un petit faible pour Twig, métis arborant les couleurs de ses deux familles, le noir des Moqueurs et le blanc des Grues. Son histoire est particulièrement dramatique et sa faculté à comprendre les autres espèces ne le rend que plus touchant. Mais Gussie n’est pas en reste avec son intelligence exacerbée et son envie de tout comprendre. Née Faucon, son histoire aurait pu être plus heureuse si son clan n’avait pas voulu imposer sa volonté quant à son avenir.

Par ailleurs, le duo Ellie – Nox apporte ce qu’il faut de tensions pour faire évoluer leur relation mais aussi et surtout leur façon de regarder le monde dans lequel ils évoluent. L’innocence d’Ellie confronte la méfiance de Nox à l’égard des adultes et de la justice faisant de La quête d’Ellie un récit initiatique rondement mené. Je suis conquise ! Il ne me reste plus qu’à patienter pour découvrir la suite déjà annoncée, pour janvier 2024.

Je remercie les éditions Bayard Jeunesse et Babelio pour cette lecture offerte par la Masse Critique Privilège.

Bienvenue dans le Royaume des clans. Ici chacun porte des ailes mais craint les menaces venues du ciel… Ellie rêve de rejoindre la garde royale des Ailes d’Or, qui protège la population des attaques de gargouilles, les monstres tapis derrière les nuages. Mais c’est une mission réservée aux castes supérieures de Faucons ou d’Eperviers, et Ellie est née Moineau. Résolue à participer malgré tout à la course de sélection des gardes, Ellie s’échappe de son orphelinant. Elle croise alors le chemin de Nox, un jeune Corbeau. Il l’entraîne malgré elle dans une aventure périlleuse, qui va bouleverser le destin d’Ellie et sa vision du monde…

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Hop hop hop l’amour ! (2022)

Auteure : Julie Lerat-Gersant

Editeur : Scrineo

Pages : 208

Sortie le 09 février 2023

Ann, quinze ans tout rond, est en seconde. Elle a une petite sœur qu’elle adore, une mère actrice et un père sage-femme. Elle a grandi dans une famille unie et aimante. Aussi, lorsqu’elle tombe sur un sexto sur le portable de sa mère, son univers s’écroule : sa mère a un amant !

Julie Lerat-Gersant signe un premier roman sur l’adolescence et raconte les bouleversements émotionnels qui viennent submerger une jeune fille lorsqu’elle prend conscience que sa mère est simplement humaine. Mais, si l’adolescence est l’élément clef de l’histoire, c’est le lien mère-fille qui en est le moteur. En effet, l’auteure prend soin de décrire la relation d’Ann et sa mère avant le texto et surtout ensuite, avec l’évolution de ses sentiments sur une histoire qui la dépasse et la pousse dans ses retranchements les plus sombres. C’es probablement cet aspect de l’histoire qui m’a d’ailleurs le plus accroché.

Car Hop Hop Hop l’amour reste malgré tout un roman porté par des adolescents auxquels je n’ai pas réussi à m’identifier et dans lesquels je n’ai pas réussi à retrouver les adolescents de mon entourage. Les débordements émotionnels avec mise en danger m’ont gênée et je n’ai pas toujours réussi à comprendre le comportement d’Ann. Pourtant, Ann est une jeune fille très sincère, à laquelle on s’attache plutôt facilement et j’ai apprécié suivre son évolution et la voir remonter la pente après être descendue si près des portes de l’état dépressif.

Elle est entourée de personnages intéressants, pas toujours à l’image de ce qu’elle mérite, mais qui chacun apporte une personnalité propre et un regard sur le monde qui va avec. Chacun a une histoire et un vécu différent, et là où Ann vit avec ses deux parents, beaucoup sont confrontés à la séparation de leurs parents avec ce que cela engendre de positif et de négatif. Pas facile de se construire quand les modèles familiaux sont si divers qu’on ne sait pas à quoi se raccrocher. Encore une fois ceux sont les adultes qui m’ont le plus séduite ; membres du monde artistique, ils sont haut en couleur et apportent une belle énergie à l’ensemble.

Au final je me rends compte que j’ai un avis mitigé sur ce roman : j’ai été touché par la relation mère-fille et j’ai aimé l’écriture dynamique et drôle de l’auteure, qui a su décrire la beauté de l’équilibre familial et les difficultés émotionnelles du passage à l’âge adulte. Mais je ne suis clairement pas amatrice de récits dans lequel les adolescents ont des comportements aussi borderline.

Je remercie Babelio et les éditions Scrineo pour l’envoie de ce titre dans le cadre de Masse Critique Privilège.

Je m’appelle Ann. Sans « e ». Jusqu’ici, mon prénom mis à part, tout était à peu près normal dans mon existence : une vie de lycéenne tranquille avec une petite sœur plutôt sympa et des parents attentionnés, actrice et sage-femme… Une famille unie, quoi ! Et pourtant, je viens de découvrir le plus terrible des secrets : ma mère trompe mon père avec son metteur en scène. Depuis ce virage à 360°, adieu l’insouciance : ma famille est en plein naufrage. Et le pire du pire ? Sa troupe de théâtre va venir répéter dans mon lycée après les vacances de Noël ! Entre un voyage à Londres, un baiser raté, le cinéma de Michael Curtiz et de plus en plus de mensonges, je tente de démasquer la face cachée de ma confidente depuis ma plus tendre enfance : ma mère. Allez, hop hop hop, je ne vais quand même pas la laisser me gâcher la vie !

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Oscar Goupil – A London Mystery (2022)

Auteure : Camille Guénot

Editeur : l’école des loisirs

Collection : Médium

Pages : 240

Oscar Goupil a treize ans, des parents fantasques et une vie plutôt solitaire. Alors que les vacances de Noël débutent, ses parents s’absentent sans la prévenir, ne lui laissant que quelques instructions concernant son planning griffonnées sur un bout de papier. Il est envoyé chez Léonie, une vieille grand-tante installée à Londres qui le loge dans une ancienne chambre de bonne, située au sous-sol de sa demeure, et l’envoie travailler à la National Gallery. Sur place, l’adolescent ordinaire, découvre des choses qui le sont bien moins et il se retrouve bientôt au cœur d’une enquête visant à retrouver des artistes contemporains mystérieusement disparus.

Enquête policière, récit initiatique, aventure fantastique, A London Mystery est un mélange de tout ça à la fois. Avec ses personnages fantasques, exubérants, caractériels ou plus discrets, ce premier roman de Camille Guénot est une véritable bouffée d’oxygène en cette fin d’année, une aventure passionnante au cœur même de l’art et un voyage à travers les époques.

Le texte amène une réflexion très intéressant sur l’art en général mais plus particulièrement sur l’accueil et l’interprétation d’une œuvre, et de son artiste, selon l’époque à laquelle ils appartiennent. L’auteure s’inspire d’artistes réels pour créer ses personnages et les intègre à son histoire avec brio, faisant d’eux des esprits aussi libres que leurs œuvres. C’est assez fascinant mais surtout cela vient mettre du peps et de l’humour au récit.

J’ai aussi apprécié l’imprégnation anglaise de l’histoire avec des personnages secondaires qui se comportent de façon très guindé, entre style classieux et obsolète. Le jeune Danny avec sa joie de vivre et ses origines plus que modestes semble tout droit sorti d’un roman de Dickens. Quant à Oscar, c’est typiquement le genre de héro auquel on s’attache et qu’on prend plaisir à voir évoluer. Par ailleurs, l’auteure s’amuse à glisser des références à la littérature anglaise renforçant l’impression, que l’on pouvait ressentir dès l’exergue, pour sa passion pour les livres.

Oscar Goupil – A London Mystery est un roman pour les amoureux des livres et les amateurs d’art, des formes artistiques dont Camille Guénot semble encenser la diversité des genres tout en soulignant les débordements. A méditer…

Je vous invite à vous rendre sur l’Île aux Trésors pour y lire l’avis d’Isabelle.

Je remercie Babelio et les éditions l’école des loisirs pour la lecture de ce titre dans la cadre de Masse Critique.

Chers lecteurs, Si vous aimez le confort douillet de votre quotidien, si vous exécrez le mystère et la magie, reposez ce livre et passez votre chemin. Car ce qui vous attend entre ces pages n’est pas pour les âmes sensibles. Je vous le tout dis tout net : je suis un garçon ordinaire à qui des choses extraordinaires vont arriver. Tout commence par la lettre que mes parents m’ont laissé, m’obligeant à passer les vacances de Noël à Londres, chez mes grand-tante Léonie. Et je vous assure que, vu sa réputation, c’est loin d’être un cadeau. Mais attention, le train part… Vous me suivez ?

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La Bête et Bethany (2020/2022)

The Beast and the Bethany

Auteur : Jack Meggitt Phillips

Illustratrice : Isabelle Follath

Traductrice : Dominique Kugler

Editeur : Bayard jeunesse

Pages : 280

Ebenezer Tweezer maintient l’apparence de ses vingt ans depuis plusieurs siècles, grâce à l’élixir de vie donné par La Bête qu’il cache au quinzième étage de sa maison. A bientôt cinq cent douze ans, il ne s’est jamais attaché à rien ni personne. Il n’aime que lui et tire fierté de ses possessions – pour la plupart offerte par La Bête – qui lui permettent de donner l’illusion d’être un homme charmant, distingué et riche.

La Bête, justement, utilise le pauvre homme pour qu’il la nourrisse de tout ce dont elle a envie. Et lorsque la faim d’un enfant joufflu et bien dodu se fait sentir, elle convint Ebenezer de lui en amener un contre sa dose d’élixir. C’est à l’orphelinat qu’il choisit Bethany, une enfant turbulente, méchante et incontrôlable. Bien sûr, les choses vont prendre un tournant imprévu et révéler des êtres plus sensibles qu’il n’y paraît.

Jack Meggitt-Phillips invite le lecteur dans une aventure délicieusement drôle et frissonnante portée par des personnages grinçants et désagréables. Les références sont nombreuses et on sent que le texte s’imprègne de la richesse de la littérature anglosaxonne. On pense bien sûr au Scrooge de Dickens, à différents personnages créés par Roald Dahl, ainsi qu’aux Orphelins Baudelaire de Lemony Snciket ; mais on peut aussi y voir une référence à Dorian Gray, ce personnage d’Oscar Wilde qui, par peur de vieillir, ou pour garder sa beauté, commet de terribles actions.

Très rapidement, on s’attache à ces deux anti-héros, qui portent en eux un profond sentiment de solitude. Ensemble, ils découvrent la richesse de l’amitié et décident de s’entraider pour devenir meilleur. Bethany utilise sa ruse naturelle pour déjouer les plans de La Bête, nous offrant un final explosif qui laisse la porte ouverte à une suite qu’on ne manquera pas de lire.

Isabelle Follath vient appuyer l’humour et l’absurde du récit par son trait expressif qui donne vie à des personnages qu’on n’arrive pas à prendre au sérieux. Les nombreuses illustrations et la mise en page aérée rendent la lecture accessible dès 8-9 ans. Il ne fait aucun doute que les enfants s’amuseront à suivre les aventures de ce duo infernal prêt à affronter la colère d’une Bête monstrueusement dégoutante pour rester ensemble.

A noter : Les droits ont été achetés par Dadid Heyman, producteur des studios Warner Bros pour une adaptation cinéma.

Je remercie Babelio et les éditions Bayard jeunesse pour cette lecture faite dans le cadre de Masse Critique privilège.

Ebenezer mène depuis 511 ans une vie de rêve grâce à un monstre hideux, capricieux mais magique qu’il nourrit dans son grenier. Un jour, la bête réclame un repas… original : un enfant. Ebenezer est très contrarié. Pour soulager sa conscience, il part à la recherche de l’enfant le plus détestable possible. Et il trouve Bethany.
Mais le plan d’Ebenezer comporte deux failles. Bethany n’a pas l’intention de se laisser faire et ils ont, tous les deux, le cœur plus tendre qu’ils ne l’auraient cru.

album·masse critique

La bande à Lily, tome 1. Un nouvel ami (2022)

Auteure/Illustratrice : Geneviève Casterman

Editeur : Esperluète

Pages : 24

L’album s’ouvre sur le plan d’un village entouré de champs. Ce village est celui où vivent Lily et ses amis : Diane, Marguerite, Claire et Basile. C’est l’été et le groupe n’est pas au complet car Diane et Marguerite sont parties pour les vacances. Ce jour-là, ils sont rassemblés chez Claire et ne savent pas vraiment comment s’occuper. Lorsque la maman de Claire les envoie jouer dehors, ils tombent sur un énorme chien sale, boiteux, plutôt affectueux et non identifié. Voilà de quoi occuper la journée. L’animal a besoin de soin et d’attention et les enfants savent aussi qu’il leur faudra trouver un endroit où quelqu’un pourra s’occuper de lui. Mais si ce chien n’était pas abandonné ?

Premier volume d’une série qui respire l’enfance, Un nouvel ami est un album qui met en avant l’amitié et l’entraide. Soucieux de bien faire, Lily et ses amis ne manquent pas de ressource pour venir en aide à cet animal esseulé. Ce qui s’apparente à un jeu pour cette petite bande de copain met par ailleurs l’accent sur un phénomène tristement répandu en période estivale : l’abandon des animaux. Si on découvre que ce n’est pas le cas ici, j’ai trouvé l’idée intéressante d’autant qu’ici il s’agit plutôt d’un chien fugueur et coquin qui va réunir la bande à Lily et un nouvel arrivant.

L’amitié est un thème universel qui ravira les jeunes lecteurs, d’autant plus qu’elle est mise en valeur par un énorme chien qui ne manque pas d’affect. Pour ma part j’ai été tout particulièrement séduite par les illustrations noires et blanches qui ajoutent un charme désuet de l’histoire. L’ambiance générale du récit joue sur la nostalgie d’une vie campagnarde dans laquelle les enfants sont plus libres d’aller jouer dehors. La simplicité du format de l’album accroît encore la nostalgie et ancre un peu plus le récit dans l’enfance de part le choix d’un papier proche du papier à dessin au touché doux, les pages sobrement cousues entre elles par un fil noir.

Je remercie Babelio et les Editions Esperluète pour cette bien jolie lecture.

C’est le premier jour des grandes vacances. Lily, Basile et Claire passent l’été au village. Bientôt, un nouvel ami va faire son apparition, pour leur plus grand bonheur…

masse critique·roman ado

Amande (2017/2022)

아몬드 

Auteure : Won Pyung Sohn

Traductrices : Sandy Joosun Lee (coréen) & Juliette Lê (anglais)

Editeur : PKJ

Pages : 336

Yunjae est un adolescent qui aborde le monde d’un regard inexpressif et cartésien. Il ne comprend pas les codes sociaux et ne sait jamais quelle réponse est attendue quand il se confronte à une situation du quotidien. Sa mère a toujours veillé à lui donner des conseils, qu’il apprenait par cœur dans son enfance, pour l’aider à être le plus « normal » possible. Mais pour Yunjae, la normalité n’a pas de définition, il a juste compris très tôt qu’il n’entrait pas dans la même case que les autres. Yunjae souffre d’alexithymie, un grand mot pour dire qu’il ne ressent aucune émotion. La cause est due à son amygdale cérébrale qui ne s’est pas développée.

Gon a passé treize ans dans la rue. Il avait littéralement disparu et personne n’arrivait à le retrouver. A son retour, il va vivre auprès de son père. Mais après les violences de la rue et le manque affectif créé par les multiples rejets (familles d’accueil, foyer…), il n’est pas prêt à laisser quiconque franchir l’armure qu’il s’est forgé. Froid, brutal, il emploie un langage cru et fait preuve d’une grande agressivité. Provocateur, il expulse sa colère en étant violent verbalement et physiquement avec les autres. Il envie à Yunjae son manque d’émotions, il aimerait lui aussi être sans peur. Mais comprend-il vraiment les implications et les dangers auxquels se confrontent son camarade ?

On comprend vite que leur rencontre sera aussi explosive que leur amitié est improbable, mais que chacun va y trouver ce qu’il cherche, ce dont il a besoin pour grandir. Car trouver le chemin qui mène à l’âge adulte n’est jamais de tout repos et, dans le cas de ces deux jeunes, le parcours est semé d’embuches et de dangers. L’amitié ne sera pas de trop pour les affronter et se relever plus fort et plus riche.

Won Pyung Sohn est une cinéaste sud-coréenne qui signe avec Amande, l’écriture d’un premier roman qui lui a valu le Prix Changbi for Young Adult Fiction. Acclamé par la critique, le texte aborde le passage à l’âge adulte par l’exploration du sens de l’existence et l’utilisation de personnages singuliers qui s’opposent et se complètent. Alors que Yunjae ne ressent aucune émotions, Gon lui est submergé par les siennes. Chacun est curieux de comprendre comment l’autre fonctionne, cherchant à combler un manque ou un trop plein émotionnel. Il est d’ailleurs intéressant de voir que celui qui est considéré comme « anormal » comprend avec plus de justesse ce qui se cache derrière la violence de son camarade.

L’histoire étant racontée par Yunjae, l’écriture est concise. L’absence d’émotions est flagrante et surprend dès les premières lignes. Impossible de se mettre à la place de ce personnage qui ne réagit à aucun stimuli là où nous serions effrayés ou bouleversés. Pourtant, on s’attache malgré tout à ce jeune homme qui tente de vivre sa vie le plus simplement possible. L’arrivée de Gon change la donne, le vocabulaire s’enrichit d’un florilège d’insultes qui révèle le tourbillon émotionnel qu’il affronte. A la lecture, on ressent toute la détresse de ce jeune en souffrance qui tente désespérément de comprendre où est sa place et pourquoi il a eu une existence si terrible.

La lecture, en fin d’ouvrage, des Notes de la traductrice du coréen vers l’anglais, montre toute la difficulté à traduire ce texte sans dénaturer le message de l’auteure. De la même manière que cette dernière a eu du mal à écrire de façon si froide, Sandy Joosun Lee n’a pas eu la tâche facile pour trouver les mots justes. On ne peut qu’imaginer qu’il en fut de même pour Juliette Lê qui a fait la traduction de l’anglais vers le français.

Si je ne serais pas spontanément aller vers ce titre, qui convient d’avantage à ma fille qu’à moi, j’ai été agréablement surprise par cette lecture. Le texte se lit très rapidement et ne manque jamais d’intérêt, invitant à poursuivre la lecture d’un chapitre à l’autre sans s’arrêter. Véritable page-turner, Amande est un roman poignant qui rappelle que l’empathie et la compassion se gagnent aussi dans l’effort.

Je remercie Babelio et les éditions Pocket Jeunesse pour l’envoi de ce roman dans le cadre de Masse Critique privilège.

아몬드 de Won Pyung Sohn, Changbi Publishers, 2017.

Yunjae, 15 ans, n’arrive pas à ressentir les émotions. Son amygdale cérébrale, son « amande », ne fonctionne pas bien. Alors, pour se fondre dans la masse, il doit retenir les codes de la société comme les tables de multiplication : imiter les autres quand ils rient, dire bonjour, s’il te plaît, merci quand il faut… Paraître « normal », en somme. Quand une tragédie bouleverse sa vie, il se retrouve seul face à l’adversité. Contre toute attente, Gon, un garçon de son âge rebelle, colérique et violent, s’intéresse à lui. Entre eux naîtra une amitié improbable qui permettra à Yunjae d’expérimenter ses premières émotions. Mais devenir plus humain et s’ouvrir aux autres a un prix…

Documentaires /Livres jeux·masse critique

Arsène Lupin Décrypté (2021)

Auteur : Philippe Durant

Editeur : LettMotif

Pages : 194

L’arrivée sur Netflix de la série française Lupin, avec Omar Sy est un succès qui a remis le Gentleman Cambrioleur sur le devant de la scène. Les éditeurs se sont emparés du phénomène pour rééditer les différentes aventures d’Arsène Lupin dans des écrins différents, du roman poche au grand format, en passant par les illustrés. J’ai pour ma part profité de ce retour pour faire découvrir les textes de Maurice Leblanc à Gabrielle, désormais grande fan du personnage (Arsène Lupin Gentleman Cambrioleur, Arsène Lupin contre Herlock Sholmès).

Philippe Durant choisit plutôt de décrypter Arsène Lupin au travers d’anecdotes sur le personnage, son univers et son auteur, sans oublier de parler des adaptations. Si certaines sembleront assez connus aux fans les plus férus, d’autres ne manqueront pas de surprendre. Le néophyte y trouvera pour sa part de nombreuses informations qui ne pourront que nourrir sa curiosité et compléter ses connaissances.

J’ai, en premier lieu, regretté que le texte s’intéresse principalement à l’adaptation Netflix mais cela est compréhensible car c’est elle qui à motiver l’écriture de ce livre, et je me suis rendue compte que cela n’enlève rien à l’intérêt général des informations transmises. J’ai appris beaucoup de choses et, ai pris plaisir à lire le texte dont le format est intéressant puisque chaque entrée part d’un mot : certains m’ont d’ailleurs surprises comme PORRIDGE ou NIKE alors que beaucoup semblaient plus évidents, ÉTRETAT ou AIGUILLE par exemple.

Arsène Lupin décrypté est un ouvrage qui ravira tous les amateurs, qu’ils le soient de longue date ou non. Ceux qui n’ont pas encore eu la chance de lire Maurice Leblanc apprécieront que l’ouvrage se termine sur la première nouvelle, L’arrestation d’Arsène Lupin.

Je remercie Babelio et les éditions LettMotif pour cette lecture faite dans le cadre de Masse Critique.

En 1905 paraît la première aventure d’Arsène Lupin, qui connaît un énorme succès immédiat…
En 2021 surgit la série Lupin, dans l’ombre d’Arsène qui pulvérise les records d’audience…
Entre ces deux dates il y eut des romans, des films, des séries, des pièces de théâtre, des produits dérivés, des hommages, des lieux… qui tous ont contribué à la renommée internationale du plus célèbre des gentlemen-cambrioleurs.
Mais Arsène n’a pas dévoilé toutes ses cartes.

Pour la première fois un livre revient sur les faits importants ou méconnus de l’univers d’Arsène Lupin, héros audacieux inventé par Maurice Leblanc.
Entre anecdotes et révélations, voici les mystères de Lupin enfin décryptés.
Il y est question de diamants et de tableaux, de gros coup et de bonneteau, de Jean-Paul Belmondo et d’Omar Sy, de savate et de camouflage, de la Normandie et du Japon, de 11.6 et de 813, de James Bond et de Tarzan, de jeu vidéo et de deep fake, d’Étretat et du Sénégal, de Stavisky et de Sherlock Holmes…

135 rubriques plus étonnantes les unes que les autres qui aident à mieux connaître le roi des voleurs, mais aussi à mieux apprécier les deux parties de la série Lupin.
Un voyage plaisant et instructif, une redécouverte d’un monde aussi fascinant qu’original, une plongée dans les exploits d’un expert de haut vol et de ses héritiers.
Désormais, Arsène Lupin n’a plus de secrets…

conte/nouvelle/biographie·masse critique

Gôshu le violoncelliste (1934/2021)

Serhiki no Gôshu

Auteur : Kenji Miyazawa

Illustratrice : Mitsukai In’ki

Traductrice : Déborah Pierret Watanabe

Editeur : Ynnis

Pages : 63

Pas facile de jouer dans un orchestre. Savoir jouer sa partition ne suffit pas, il faut aussi savoir s’écouter jouer et surtout, écouter les autres pour que les cœurs jouent à l’unisson et que la musique vienne toucher l’auditoire. Gôshu, le violoncelliste, donne du fil à retordre à son chef. Il a beau travailler encore et encore, son jeu manque d’émotion. Une nuit, un chat se présente à lui et lui demande de jouer de son instrument. C’est le premier de quatre animaux à lui faire une requête qui, toujours, va venir soulever un point essentiel pour faire progresser le jeu du jeune homme et apporter ce qu’il manque à sa musique.

Gôshu le violoncelliste s’inscrit dans le registre du conte merveilleux de par sa narration rapide, peu étoffée, et les événements improbables qui surgissent sous la forme d’animaux qui parlent. Leur rôle est d’aider le héros à affronter sa musique pour le faire évoluer et progresser ; c’est un véritable récit initiatique. Pourtant, le texte de Kenji Miyawa n’est pas toujours très clair. Les différents animaux interviennent à intervalle régulier, un par nuit, sans que l’on assiste à un quelconque changement dans la journée. On a presque l’impression qu’ils viennent tous la même nuit. Il faut vraiment attendre la fin du conte pour comprendre leur rôle.

Il est d’ailleurs fort appréciable de trouver en fin d’ouvrage un petit supplément « de la page à l’écran » qui met vraiment en lumière les thématiques du conte et sa signification avant de nous expliquer comment Isao Takahata des Studios Ghibli l’a mis en scène dans son film d’animation. [J’attends d’ailleurs que ma jeune violoncelliste débutante ait lu ce livre avant de visionner le film avec mes filles.] Enfin, j’ai vraiment apprécié l’entretien mené auprès d’Edgar Moreau (violoncelliste français) relaté à la toute fin du livre. Il offre un regard de musicien aguerri sur le parcours d’instrumentiste que ce soit dans la formation ou dans la place dans un orchestre. Son interprétation du conte en est d’autant plus intéressante.

Merci aux éditions Ynnis et à Babelio pour l’envoi de ce conte dans le cadre de Masse Critique.

Le chef d’orchestre est exaspéré. Son jeune violoncelliste ne laisse transparaître aucune passion dans son jeu. Désespéré, Gôshu répète inlassablement ses morceaux sur son instrument abîmé. En vain… jusqu’à ce qu’un chat lui demande de lui jouer Rêverie de Schumann…

masse critique·roman jeunesse

Otis (2021)

Auteur : Yannick Beaupuis

Editeur : Balivernes

Pages: 204

Atteint d’une forme d’autisme Asperger, Ulysse a tendance à se replier sur lui-même. Cette différence en fait la cible facile des moqueries et de l’exclusion. Son quotidien semble une épreuve de chaque instant, tant pour lui-même que pour ses proches, confrontés à des difficultés permanentes qui ont des répercussions sur l’ensemble de leur vie.

Otis aussi est différent. Enfant humain, il vit parmi des hybrides, mi-homme mi-animaux. Seul capable de lire les runes inscrites sur les pierres qu’il ramasse, il ne semble pas complètement intégré à son groupe. Les dangers de son monde l’entraînent dans une quête mystérieuse pour sauver une amie et peut-etre bien plus encore…

Otis est un récit qui parle de différence au travers de deux histoires distinctes. L’histoire d’Ulysse, plus encrée dans notre réalité, confronte le lecteur au quotidien des enfants différents et de leurs proches. Alors que l’histoire d’Otis s’inscrit plutôt dans le registre fantastique avec ses créatures et la magie qui peuplent des paysages imaginaires. Si les deux histoires avancent de manière parallèle, il est difficile d’établir un lien entre elles. Le monde d’Otis existe-t-il vraiment ou est-il le refuge imaginaire dans lequel Ulysse s’isole pour échapper à une réalité trop violente ?

L’écriture très imaginée de Yannick Beaupuis permet de visualiser ces deux mondes très distinctement, rendant la lecture très immersive. Je craignais au début que la différence d’Ulysse ne soit qu’un prétexte à l’introduction d’un univers plus fantastique mais il n’en est rien. Au contraire, chaque univers se développe indépendamment tout en tissant une connexion à peine perceptible. Les deux héros cherchent à trouver leur place et nous rappellent que la différence est une force, une richesse qui mérite qu’on se batte malgré les difficultés.

Les jeunes lecteurs apprécieront ce mélange des genres et ces deux jeunes garçons attachants.

Je remercie Babelio et les éditions Baliverne pour cette offre de Masse Critique.

Deux jeunes garçons, que rien ne rapproche sinon leur âge, essayent de trouver leur place dans deux mondes bien différents.
Otis grandit dans le campement des hybrides, des créatures mi-hommes mi-animaux qui l’ont adopté depuis bien longtemps et qui vivent entre l’Arbre-source incandescent et la forêt ténébreuse peuplées d’Ombres redoutables.
Ulysse, lui, va à l’école comme tous les autres enfants mais sa différence l’éloigne des autres et est même le prétexte pour certains de le rejeter et de l’exclure.
Chacun de leur côté devra vaincre les épreuves qui s’imposeront à eux. Et d’une manière ou d’une autre, leur destin ne serait-il pas lié ?

masse critique·roman jeunesse

Amari et le Bureau des affaires surnaturelles (2021)

Amari and the Night Brothers

Auteur : B.B. Alston

Traductrice : Sidonie Van Den Dries

Editeur : Bayard Jeunesse

Pages : 525 pages

Lorsque qu’Amari et le Bureau des affaires surnaturelles est arrivé chez nous, mes filles et moi-même avons été complétement séduites par l’attention apportée à ce Service Presse par les éditions Bayard. En effet, en ouvrant le carton nous avons trouvé un coffret qui, outre le roman, contenait tout un tas de goodies reçus comme autant de petites attentions venues nous gâtées. Si ces présents ont pour but de séduire le lecteur, ils auraient été superflus si le roman n’avait été de qualité. Or, nous avons découvert dans ces pages un roman fantastique qui nous a transporté. Gabrielle s’est emparée du livre et l’a dévoré d’une traite. Et si j’ai pris plus de temps, je n’en ai pas pris moins de plaisir. Pour Juliette, c’est le nouveau livre qu’elle amène au collège pour le « quart d’heure lecture quotidien ». Fan de Harry Potter, de magie et d’univers fantastiques, ce titre est fait pour toi!

Alors que son frère a disparu depuis six mois, Amari reçoit un colis de sa part ; un colis particulier qui va l’emmener dans un centre de vacances mystérieux où la jeune fille va découvrir que notre monde est peuplé de créatures surnaturelles dissimulées parmi nous et protégées par Le Bureau des affaires surnaturelles. Déjà rejetée par ses camarades à cause de ses origines, Amari devient une paria lorsque ses talents surnaturelles sont révélés. Avec le soutien de sa camarade de chambre Elsie, une dragonne-garou, elle se lance à la recherche de son frère tout en tentant de trouver sa place. Lorsque le Bureau se fait attaquer par de terribles créatures, on découvre un monde moins stable qu’il n’y parait.

Nous sommes ici en présence d’un premier volume qui introduit un univers fantastique peuplé de créatures fantastiques divers toute droit sorties de l’imaginaire collectif. Des créatures qui semblent plutôt intégrées dans le monde si ce n’est la catégorie des magiciens dont les faits passés ont laissé une emprunte indélébile dans l’esprit de tous. Mais Amari est bien déterminée à prouver que même chez les magiciens, il y a des êtres bons et bienveillants. Rejetée depuis toujours à cause de ses origines sociales et sa couleur de peau, Amari souffre d’un manque de confiance en elle. Ses doutes semblent être un frein à l’expression de son potentiel « magique » mais elle peut compter sur ses nouveaux amis pour l’aider. Elsie est une dragonne-garou extrêmement intelligente et inventrice de génie. Dylan est l’héritier d’une famille ancienne et puissante, il semble entretenir un désir de prouver sa valeur. On trouve aussi quelques professeurs intéressants, créatures surnaturelles et aux pouvoirs particuliers.

Amari et le Bureau des affaires surnaturelles est un récit qui ravira les jeunes lecteurs, notamment les fans de la saga Harry Potter. En effet, dans la construction du récit et dans sa narration, nous n’avons pas manqué de trouvé un grands nombres de similitudes avec l’univers de J.K. Rowling. Entre le rejet du personnage principal, un monde « magique » dissimulé dans le notre, un lieu de formation secret et l’ombre planante d’un grand sorcier qui sème la peur, on sent inévitablement d’où l’auteur tire son inspiration. Mais l’histoire offre une part d’originalité satisfaisante, portée par une héroïne volontaire dont la couleur de peau et le mode de vie permettent aussi d’aborder des thématiques très encrées dans notre réalité telle que le racisme, la mixité sociale dans les établissements scolaires ou encore les différences sociales.

Amari et le Bureau des affaires surnaturelles nous a complètement séduite par son histoire et son univers. Etre en terrain connu offre aussi un confort de lecture appréciable, pimenté par les petites surprises propres au monde créé par B.B. Alston.

Nous avons hâte de retrouver le tome 2, annoncé pour avril 2022 outre-Manche.

Un grand merci aux éditions Bayard Jeunesse et à Babelio pour ce partenariat.

Etes-vous prêts à rejoindre le Bureau des affaires surnaturelles?*

Les informations qui suivent sont confidentielles, car elles concernent un lieu abritant d’innombrables secrets. Quiconque lira ce dossier sans disposer des autorisations nécessaires s’exposera à de terribles représailles et pourra notamment :

  • être balancé dans un puits sans fond ;
  • être enfermé dans une boîte de conserve et envoyé dans l’espace ;
  • être livré en pâture à une créature sous-marine dont nous ne divulguerons pas le nom.

*Le Bureau ne saurait en aucun cas être tenu responsable d’éventuelles blessures magiques, peurs surnaturelles ou enlèvements extraterrestres. Entrez à vos risques et périls.