Docu

Royaumes minuscules (2021)

Auteure : Anne Jankeliowitch

Illustratrice : Isabelle Simler

Editeur : La Martinière jeunesse

Pages : 64

C’est d’abord le trait si caractéristique d’Isabelle Simler (Les idées sont de drôles de bestioles, Noms d’oiseaux ! (des amours)/(des humeurs)) qui m’a attiré vers cet album très grand format ; un album documentaire généreux qui nous raconte la vie de ces insectes sociaux vivant par et pour le groupe.

Car Anne Jankeliowitch a beaucoup à dire sur les abeilles, fourmis et autres termites qui peuplent la planète. Ingénieur spécialisée dans l’environnement, elle communique aux lecteurs ses connaissances de la nature et ne laisse rien au hasard : de la naissance à la mort, en passant par l’organisation d’une famille, la construction du nid, l’alimentation et leur adaptabilité, ces indispensables à la biosphère n’auront plus aucun secret pour vous.

Sublimé par les illustrations de la talentueuse Isabelle Simler, Royaumes minuscules émerveille par la beauté qui émane de ses planches, créant la surprise de la découverte par ses volets à soulever, sous lesquels se dissimulent des images en coupe et autres aperçus de ce qui se cache sous la surface. L’ensemble prend la forme d’un documentaire de grande qualité, qui va bien au-delà de l’informatif puisque l’auteure prend le temps d’y glisser un petit message de sensibilisation à l’extinction des polinisateurs et d’amuser le lecteur avec un petit lexique des expressions de la langue française.

Pars à la rencontre des insectes sociaux, des fourmis aux termites en passant par les abeilles, les guêpes et les frelons. Un très beau documentaire animé pour aiguiser le sens de l’observation des plus jeunes et les sensibiliser à la protection de ces insectes si petits mais si précieux.

Une invitation au voyage et une plongée dans l’infiniment petit.

roman

L’héritage d’Anne – Une fable sur le climat et l’environnement (2003/2016)

Anna – En fabel om klodens klima og miljø

Auteur : Jostein Gaarder

Traductrice: Céline Romand-Monnier

Editeur : Points

Pages : 184

Anna a seize ans et vit en Norvège. La nuit, dans ses rêves, elle est Nova, une autre adolescente de seize ans dont Anna comprend qu’elle est son arrière-petite-fille. Car Nova vit en 2082 dans une Norvège qui ne ressemble plus à celle d’Anna. Les paysages sont transformés par le réchauffement climatique, et il n’est pas rare d’y croiser de longues caravanes menées par des dromadaires. L’Afrique s’est transformé en un immense désert et, comme la majorité de la population de l’hémisphère sud, les peuples de la péninsule arabique sont devenus des réfugiés climatiques.

Anna et Nova sont toutes deux très conscientes des changements causés par le réchauffement climatique mais là où Nova est prisonnière d’un héritage qu’elle n’a pas voulu recevoir, Anna sait qu’il n’est pas encore trop tard pour agir. Soutenue par Jonas, son petit-ami, et encouragée par Benjamin, un thérapeute devenu un ami, elle décide de créer un mouvement écologique dans son lycée pour sensibiliser et interroger la conscience collective sur ce vaste sujet.

Le voyage temporel d’Anna questionne notre rapport à la vie dans ce qu’elle a d’intemporelle. Nous sommes devenus autocentrés et égoïstes, désirant toujours plus et créant une société à notre image, une société consumériste. Lorsqu’Anna découvre le monde de Nova, elle comprend que nous devons changer pour donner une chance aux futures générations. Sa réflexion remet en question notre façon horizontale de penser la vie et le temps, réduisant ainsi l’échelle à notre propre existence. Elle nous pousse à redéfinir le temps de façon verticale pour y inclure les générations futures qui habiteront la même planète et devront faire avec ce qu’on leur a laissé.

L’héritage d’Anna est avant tout une fable écologique dans laquelle l’auteur nous invite à réfléchir à notre impact sur la planète et les conséquences qui en découleront à plus ou moins long terme. Mais c’est aussi une histoire d’héritage qui interroge sur la frontière entre le rêve et la réalité au travers d’un bijou mystérieux que les femmes de la famille se lèguent depuis plusieurs générations, un bijou qui renvoie au mythe d’Aladin et les Contes des Mille et une nuits.

Anna, jeune Norvégienne d’aujourd’hui, est préoccupée par la préservation de la nature. A travers d’étranges rêves très réalistes, elle peut communiquer avec son arrière-petite-fille. Cette dernière, vivant presque un siècle plus tard, l’alerte sur l’état dramatique de la planète. Anna veut alors trouver le moyen d’influencer le présent pour garantir à ses descendants un avenir meilleur et plus vert.

BD/manga

Les Godillots (2011 à 2018)

Les Godillots de Olier & Marko, Bamboo édition

Voilà une petite série qui aborde la Première Guerre Mondiale avec une certaine légèreté, rendant la lecture accessible à un public relativement jeune. Si vous avez lu La guerre des Lulus, vous savez que cette série jeunesse s’intéresse au point de vue des civiles, Les Godillots eux, nous entraînent dans les tranchées, au cœur même du danger, en compagnie d’un régiment chargé du ravitaillement des troupes françaises.

Véritable tour de force de la part d’Olier qui arrive à relater des évènements assez terribles : les méthodes barbares des compagnies franches, la perte d’esprit de certains soldats fragilisés par les horreurs du champ de bataille… , avec un certain recule et un détachement qui permettent d’évoquer les horreurs de la guerre sans sombrer dans la boucherie.

On note d’ailleurs que les uniformes restent plutôt propres au fil des années et gardent ce gris bleu du début à la fin, donnant aux illustrations la même légèreté et le même regard sur le parcours des poilus. De même, la colorisation reste lumineuse et on sent que Marko a tenté de préserver la légèreté relative du texte. Un texte porté par des personnages hauts en couleur qui donnent à leur régiment des allures de folie, comme si on avait réuni les plus loufoques des engagés dans un seul et même régiment.

On apprécie aussi l’humour omniprésent, le duo Palette – Le Bourhis, l’humanité des personnages, leur naturel, le trait de Marko et tant de choses qui font que Les Godillots est une série de qualité. On pourra cependant regretter une chronologie qui part dans tous les sens et l’inégalité scénaristique d’un volume à l’autre. Mais cela n’enlève rien au plaisir de la lecture ni à l’émotion ressentie.

A noter, en fin de chaque volume un petit dossier qui revient sur les faits historiques, des événements qui servent de base au scénario essentiellement et même un jeu de rôle.

Au cours de la Grande Guerre, dans une escouade de seconde ligne, deux soldats sont chargés de s’occuper de la « roulante », la cuisine itinérante, et du ravitaillement en nourriture des tranchées du front. Pour y acheminer la soupe, le café et les patates, ils doivent malheureusement traverser une zone placée sous le feu d’un mitrailleur ennemi surnommé « le Croquemitaine » par les Poilus en raison du grand nombre de victimes qu’il a déjà infligées dans les rangs français. Mais, dans ce no-man’s-land, ils font une rencontre inattendue qui va bouleverser leur destin et leur permettre de mettre au jour une sinistre combine au sein de la tranchée B12…

Le coin de Gaby·Le coin de Ju

Culture adolescente #8

Le rythme s’est installé et les filles se sont donc remises à lire à divers moments de la journée, et à regarder la TV en fin de journée. Juliette ayant été malade, elle a eu un début de semaine assez calme et s’est rattrapée ensuite.

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Que lisent-elles à 13 ans 1/2 ?

Toujours beaucoup de BDs. Pendant que Juliette poursuit une série découverte récemment et accepte d’en découvrir une nouvelle, Gabrielle se lance dans tout ce qui passe entre ses mains. La médiathèque renouvelle régulièrement son stock et cela lui permet de faire de bien belles découvertes.

Du côté des romans, elles ont découvert des « premières lectures »… Juliette ayant eu du temps à la maison s’est mise en mode cocooning et a sorti des lectures doudous. Les chats sont donc de retour 😀

Gabrielle, toujours fan du beau, a glissé vers des emprunts que je fais surtout pour moi avec des albums jeunesses divers.

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Que regardent-elles à 13 ans 1/2 ?

Il n’y a eu qu’un film cette semaine, celui choisit pour le « dimanche animation » familial. Juliette a vraiment aimé (l’a même revu en semaine) alors que Gabrielle n’a pas accroché plus que ça.

Du côté des séries, Juliette avance lentement sa série d’animation japonaise, pendant que Gabrielle en suit deux autres avec son frère. Elle a aussi débuté Wednesday qu’elle aime déjà beaucoup.

roman ado

Ma petite bonne (2022)

Auteur : Jean-François Chabas

Editeur : Talents Hauts

Collection: Les héroïques

Pages : 228

Nada avait dix-sept quand Ife fut achetée par sa famille comme domestique. Désormais quarantenaire, elle se remémore cette époque de sa vie avec le recul suffisant pour se rendre compte de l’erreur de penser que son comportement était normal en se basant sur le fait que tout le monde faisait de même. Car plutôt que domestique, Ife tient plus la place d’une esclave. Son quotidien n’est que labeur et humiliation. Si Nada n’est déjà pas tendre avec elle, ce n’est rien comparé à ce que lui fait subir Albertine, sa grand-mère, particulièrement violente et raciste envers la jeune éthiopienne.

Ma petit bonne dénonce la Kafala, cette forme d’esclavage moderne acceptée au Liban et dans d’autres pays du Moyen-Orient, en plaçant sous le même toit deux jeunes filles du même âge, différente dans leurs origines et leur place dans le foyer. Si Nada est très autocentrée et ne songe pas un instant aux difficultés rencontrées par Ife, elle se confronte pourtant peu à peu à la dure réalité d’une pratique abusive qui enferme des jeunes filles dans une vie qu’elles n’ont pas choisi mais qu’elles subissent par devoir pour faire vivre une famille rester au pays.

En suivant l’évolution de Nada dans sa famille et sa communauté libanaise, le lecteur est invité à découvrir une culture et une façon de vivre différente, une société dans laquelle se confronte un fort désir de modernité et des traditions ancestrales. Au contact d’Ife, Nada prend bientôt conscience que la Kafala n’est pas le seul problème de leur culture, que la place des femmes en général est à redéfinir, de même que celle des homosexuels.

Jean-François Chabas signe un titre sensible et percutant, qui interroge sur le pouvoir des hommes dans les sociétés patriarcales, sur la place des femmes et le rôle qu’elles ont à jouer dans leur émancipation, en commençant peut-être par regarder les autres femmes comme leurs égales. Ma petit bonne est un récit essentiel qui met le doigt sur des problèmes de société actuels et une étude ethnologique intéressante sur les sociétés moyen-orientales aux prises avec leur désir de modernité écrasé par le poids des traditions.

L’avis de Lucie est à lire ICI.

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1993, Beyrouth – Nada, 17 ans, ne voit rien à redire à ce que sa famille « achète » une nouvelle domestique : Ife, une jeune Ethiopienne au visage tatoué et à la docilité têtue. D’abord indifférente et complice des méthodes archaïques, des propos racistes et de la violence de sa grand-mère, Nada va progressivement remettre en question son rapport à leur « petite bonne ». Les tensions et évolutions qui traversent la famille de Nada sont à l’image de celles qui fracturent les sociétés moyen-orientales tiraillées entre tradition et modernité.

Le coin de Gaby·Le coin de Ju

Culture adolescente #7

Semaine de rentrée, la TV est éteinte. Elles ont profité du week-end pour finir de regarder ce qu’elles voulaient finir avant d’être limité. Et il y a eu moins de lectures, le temps de se remettre dans la bain collège et conservatoire.

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Que lisent-elles à 13 ans 1/2 ?

Juliette a essentiellement lu le tome 7 d’Harry Potter qu’elle a fini hier soir, et une bande dessinée dont elle était curieuse après nous avoir entendu rire en la lisant. Gabrielle a sorti les dernières BDs que j’ai récupéré à la médiathèque. Au final, cette dernière a bien moins lu qu’elle ne le voulait car elle a eu énormément de travail pour le conservatoire et le collège…

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Que regardent-elles à 13 ans 1/2 ?

Gabrielle s’est consacrée toute entière à Arcane, une série ambiance Steam punk dont elle s’est complètement entichée. Elle a prévu de la revoir ce week-end pendant que nous accompagnerons sa sœur en compétition d’escrime. De son côté, Juliette a mis l’accent sur les films doudous, ne regardant qu’un seul épisode de sa série d’animation. Lors de notre soirée film d’animation familiale, elle-seule a regardé Les aventures de Winnie l’ourson avec nous.

BD/manga

Le jardin secret – Seconde Partie (2022)

Auteure/Illustratrice : Maud Begon

d’après Frances Hodgson Burnett

Editeur : Dargaud

Pages : 112

Comme il semble loin le temps où la petite Mary arrivait des Indes dans le manoir anglais de son oncle. Pleine de vie, elle a le sourire en permanence, s’est remplumée et a pris des couleurs. Oh bien sûr elle n’a pas perdu son caractère et elle sait montrer de quel bois elle se chausse lorsqu’elle affronte les colères de son cousin, Colin. Ce n’est tout simplement plus la même enfant ! Ce dernier, maladif et chétif, est maintenu à l’isolement et vit, cloué au lit, comme un mourant depuis sa naissance, dix ans plus tôt. Mais Mary est convaincue que ce dont son cousin a le plus besoin c’est d’amitié, d’air frais et de la magie du jardin secret pour devenir un petit garçon comme les autres.

A l’image de sa couverture, cette seconde partie du récit est bien plus lumineuse que la première. Maintenant que Mary a pris goût à la vie, elle entend bien profiter de tout ce qu’elle a à lui offrir et il est hors de question de ne pas en faire profiter son cousin. Avec beaucoup de patience, d’encouragement et, il faut bien l’avouer, quelques belles disputes, les deux enfants se rapprochent et comblent leur solitude par leur compagnie mutuelle. La présence de Dickon et ses animaux est un véritable baume au cœur. Les enfants passent tout leur temps ensemble et profitent de l’air vivifiant et de tous les bienfaits que la nature peut leur offrir.

Car la nature est vraiment omniprésente dans ce second volume. Parce que les enfants sont souvent dehors, parce qu’ils sont toujours dans le jardin secret qui offre un paysage préservé, presque sauvage, dans lequel les animaux viennent faire leur nid et se cacher ; les fleurs, arbres et autres végétaux poussent de façon extravagante comme pour rappeler qu’ils n’ont pas besoin de l’homme pour se développer. Alors que les petits mammifères, à l’image de Mary et Colin, viennent chercher auprès de Dickon l’attention et les soins dont ils ont besoin pour (sur)vivre.

Maud Begon déploie une palette de couleurs chatoyantes pour donner vie à tout ce petit monde et l’enrichie d’une multitude de fleurs de toutes les couleurs, de mammifères, oiseaux et insectes qui rendent compte d’un travail minutieux. Ses planches sont de toute beauté ; j’avoue avoir été particulièrement émue par les illustrations pleines pages… mais il se dégage une grande sensibilité au fil des pages. On retrouve dans l’évolution de Colin, les mêmes changements de couleurs ou d’expressions qu’on pouvait noter chez Mary, donnant à ce diptyque une symbolique de renaissance qui se répète comme un cycle de vie. C’est tout simplement magnifique !

Après la mort de ses parents aux Indes, Mary est recueillie par son oncle toujours absent, dans un sombre et étrange manoir perdu sur la lande anglaise. C’est là que Mary découvre les indispensables bonheurs que procurent l’amitié et la nature grâce à un mystérieux jardin secret.

roman jeunesse

Les gargouilles de Morne-Ecu (2022)

Auteure : Aurélie Magnin

Illustratrice : Caroline Leibel

Editeur : Alice

Collection : Deuzio

Pages : 132

Fan de l’époque médiévale, j’avais hâte de découvrir ce roman jeunesse dont la couverture promettait une héroïne de caractère et des gargouilles plus terrifiées que terrifiantes. Et je peux dire que j’ai vraiment passé un bon moment en compagnie de ces gargouilles. Découpée en deux parties, l’histoire se déroule sur deux époques : le douzième siècle d’un côté, le vingt-et-unième de l’autre.

Au XIIe siècle, le tailleur de pierre Erec peine à gagner sa vie en vendant les gargouilles qu’il taille pour la nouvelle cathédrale de Fabiourg. Les seigneurs de la ville ne lui paient que la moitié de son dû car il vient de la miséreuse Morne-Ecu. Sa fille, Aélis, dirigée par un puissant sentiment d’injustice, s’apprête à commettre un interdit pour venger sa famille et ses voisins des citadins, se condamnant, ainsi que tous ses descendants, à subir une malédiction. Il faudra attendre d’être de nos jours, pour que Camille, la dernière née de cette famille, puisse se confronter aux légendes de sa famille pour tenter de tous les sauver.

Les gargouilles de Morne-Ecu est avant tout un récit fantastique original et drôle, bien qu’il aborde aussi des thématiques plus sombres telles que le poids de l’héritage, les inégalités sociales et de genre ou encore la cruauté envers les animaux. Les gargouilles sont ici des animaux décriés par leur apparente laideur alors qu’elles ne sont que gentillesse et gloutonnerie. Naïves et maladroites, elles sont pourtant très attachantes et sont des personnages essentiels à l’histoire.

Le récit est bien mené, bien pensé et ne manque pas d’originalité. On pourra cependant regretter l’enchainement un peu trop rapide des événements. Je dois bien admettre que, si le saut dans le temps ne m’a pas gêné et m’a même paru très cohérent, j’aurais aimé passer un peu plus de temps au Moyen-Age. Je pense qu’il y avait matière a nourir un peu plus le récit de magie et de vengeance et à donner un peu plus de consistance aux deux personnages féminins pour les rendre plus attachantes. Cela reste une aventure vraiment sympathique pour initier les jeunes lecteurs au récit fantastique, et passer du temps en compagnie d’adorables créatures.

XIIe siècle – dans le foyer d’Erec, le tailleur de pierre, la misère se fait sentir. Son élevage de gargouilles est en danger. Aélis, sa fille, s’apprête à prendre une décision radicale, portée par la colère et un fort sentiment d’injustice…

De nos jours – dans les boutiques de Mornécuens, d’affreuses figurines de gargouilles rappellent la légende régionale : les deniers spécimens auraient vécu au village. Camille, la descendante d’Aélis, n’y croit pas, mais plus pour bien longtemps…

roman jeunesse

L’Apprenti conteur (2022)

Auteur : Gaël Aymon

Illustrateur : Siegfried de Turckheim

Editeur : l’école des loisirs

Collection : Neuf

Pages : 152

Charles Perrault a décidé d’envoyer son fils à la campagne avec l’espoir qu’il y trouve l’inspiration qui le fera remarquer à cour de Versailles. A douze ans, Pierre n’aime pas la poésie et lorsqu’il rencontre Mariette, il se laisse facilement convaincre que les contes ont le vent en poupe auprès de Mademoiselle, la fille du roi. Il accepte de rencontrer sa nourrice qui lui raconte une histoire assez pauvre après lui avoir arraché la promesse d’une réécriture plus qualitative. Sur le chemin du retour il fait une terrible rencontre, la première d’une série qui tend à se répéter chaque nuit et dont il ressort avec l’envie frénétique d’écrire des pages et des pages sur son cahier.

Gaël Aymon prend pour point de départ les contes de Ma mère l’Oye en se basant sur l’hypothèse selon laquelle Pierre Perrault, dit Darmancour, en aurait écrit l’essentiel ; son illustre père y aurait ensuite apporté quelques modifications, dont on ne connait pas exactement la teneur, avant de les faire publier. Il peuple son univers de personnages terrifiants, poussant son héros à affronter ses peurs les plus terribles et signe un titre aussi sombre que sa couverture.

Les contes contiennent toutes les peurs des enfants afin qu’ils s’en libèrent.

Mais L’Apprenti conteur va bien au-delà du conte de fées et flirte avec le fantastique en plongeant son personnage principal dans un monde chimérique qui le fait douter des limites de son imagination, poussant également le lecteur à s’interroger sur la frontière entre le réel et l’imaginaire, et sur l’existence d’une vie après la mort.

Car il est ici bien question du temps qui passe et de l’emprunte laissée par le souvenirs de notre passage sur Terre lorsque l’on passe de vie à trépas. Ainsi, si Pierre a besoin de l’écriture pour faire le deuil d’un être cher, la nourrice utilise la plume du garçon pour inscrire ses histoires dans la mémoire collective en le poussant à leur donner une substance plus moderne et en adéquation avec son époque ; époque durant laquelle la transmission orale s’est perdue.

Conte fantastique mais également récit initiatique, L’Apprenti conteur est un roman très sombre qui séduira les amateurs de frissons. L’écriture de Gaël Aymon joue sur l’effet de surprise pour effrayer son héros et son lecteur, sentiment renforcé par les illustrations toutes en noir et blanc de Sigfried de Turkheim qui viennent assombrir un peu plus le récit. L’objet livre est par ailleurs magnifique dans sa mise en page qui introduit chaque chapitre par une citation de chacun des huit contes d’origine en les encadrant de ronces.

Je vous invite à lire l’avis de Tachan.

Pas facile d’être le fils du grand Charles Perrault… A douze ans, Pierre est envoyé à la campagne pour y écrire le recueil de poèmes qui le fera remarquer à Versailles. Afin d’échapper à la corvée, le garçon se dit que collecter des contes auprès d’une vieille nourrice puis les retranscrire ne devrait pas lui demander trop d’efforts. Mais la première histoire, celle d’une petite fille croquée par un loup, n’a ni queue ni tête et tient en trois lignes ! Il faut bien davantage pour captiver des lecteurs. Fort heureusement, Pierre a une imagination débordante et de quoi l’alimenter. Chaque nuit, il fait d’étranges rencontres : une petite Mariette habillée d’un chaperon rouge, un messire Leloup qui porte une barbe aux reflets bleutés, sept petites ogresses… De quoi donner des idées à l’apprenti conteur.