roman graphique

Nellie Bly – Dans l’antre de la folie (2021)

Auteure : Virginie Ollagnier

Illustratrice : Carole Maurel

Editeur : Glénat

Pages : 162

Après la série de Roseline Pendule, Nellie & Phileas – Détectives Globe-Trotters, j’avais très envie d’en savoir plus sur Nellie Bly, cette femme incroyable qui a marqué son époque et ouvert la porte du journalisme d’investigation. Concernée par la condition des femmes et déterminée à changer les choses, elle n’aura de cesse de dénoncer le traitement qui leur est réservé, que ce soit sur leur lieu de travail ou dans de soi-disant instituts de santé.

New York, 1887. Une jeune femme paie pour le gite et le couvert dans ce qui semble être une pension de famille pour femmes. Rapidement elle montre des signes de confusion et d’instabilité. Au matin, la police a été appelé par la logeuse et l’emmène au tribunal. Jugée folle, elle passe facilement toutes les étapes qui conduisent à l’asile de l’île de Blackwell, géré par la municipalité. Cette jeune femme est Nellie Bly, une journaliste de terrain qui cherche à se faire embaucher par le New York World. Elle vient de s’infiltrer, sans aucune difficulté, dans l’antre de la folie, pour enquêter sur les conditions de détention des femmes qui y sont retenues.

Si vous avez lu Le Bal des Folles de Victoria Mas, ou vu son adaptation par Mélanie Laurent, vous avez une assez bonne idée de ce qui se passe entre les murs de Blackwell. Humiliation, violence physique et psychologique, mauvais traitement, hygiène déplorable, rien n’est épargné à ces femmes dont la seule faute est d’être pauvres. Saines d’esprit, elles sont placées dans cette institut par un membre de leur famille, généralement un homme, mais y viennent parfois d’elle-même, car elles sont un poids financier pour un père ou un fils, voir parfois un mari… Le froid, la faim et l’ennui les privent peu à peu de leur humanité ; cassées par les matonnes, médicamentées sans raison, la plupart finissent par trouver refuge dans la folie.

Nellie Bly aura passé dix jours dans cet institut, dix jours qui lui parurent une éternité. Convaincue du bien fondée de son action et, suite à la publication de son article, elle devient le visage et la voix de toutes ces femmes pour qui elle entend bien changer les choses. Unique témoin elle monte au tribunal pour révéler les rouages qui conduisent à Blackwell et les conditions inhumaines que l’on réserve aux pensionnaires sur place. Pionnière du journalisme d’investigation, elle n’aura de cesse de s’infiltrer dans des milieux divers pour défendre les droits des femmes.

Sublime roman graphique qui nous entraîne dans une époque difficile pour les femmes qui ne sont encore que très peu considérées. On y découvre une jeune femme élevée dans l’amour d’un père qui pensait que les femmes devaient aussi recevoir une instruction. Sa mort prématurée va mettre en avant l’injustice d’une société faite par et pour les hommes. Le travail de recherches de l’auteure est retranscrit avec justesse et on prend plaisir à suivre Nellie dans son enquête entre-coupée de flashback qui nous racontent son enfance et ses premières expériences journalistiques. Le dossier de fin d’ouvrages complète l’ensemble pour nous en dire plus.

Le travail graphique n’est pas en reste avec ses teintes sépia qui nous plongent dans l’époque. La folie est par ailleurs superbement représentée par des apparitions fantomatiques et des formes tentaculaires qui disent toute la tension et l’emprise psychologique qui règnent en ce terrible lieu. Par ailleurs, le travail sur les expressions rendu très réaliste, permet de s’attacher à ces femmes de tous âges en suscitant empathie et compassion. L’ensemble est un roman graphique percutant à découvrir ne serait-ce que pour en savoir plus sur cette femme qui a marqué son époque.

POUR MENER SON ENQUETE, ELLE SE FAIT PASSER POUR FOLLE. Nellie Bly serait complètement folle. Sans cesse, elle répète vouloir retrouver ses « troncs ». Personne n’arrive à saisir le sens de ses propos, car en réalité, tout cela n’est que mystification : Nellie cherche à se faire interner dans l’asile psychiatrique de Blackweel, à New York, dans le but d’y enquêter sur les conditions de vie de ses résidentes. Y parvenant avec une facilité déconcertante, elle découvre un univers glacial, sadique et misogyne, où ne pas parfaitement remplir le rôle assigné aux femmes leur suffit à être désignée comme aliénée. L’HISTOIRE VRAIE DE LA PIONNIERE DU JOURNALISME D’INVESTIGATION ET DU REPORTAGE CLANDESTIN.